Le Monde | 17.05.2016 à 16h34 |Par Pierre Jaxel-Truer

Cette députée européenne s’est prononcée en faveur de la contraception et de l’avortement. Au grand dam des tradis du parti d’extrême droite.

Lepéniste comme papa

Fille d’un chirurgien-dentiste franc-comtois militant frontiste, Sophie Montel, 46 ans, est tombée dans la marmite du FN quand elle était petite. Elle a pris sa première carte d’adhérente à sa majorité, fidèle à Le Pen père naguère, dévouée à la fille aujourd’hui.

Politicienne de profession

Sa carrière politique suit la montée en puissance du FN dans sa région. Titulaire d’un DEA en histoire médiévale, elle n’a jamais exercé d’autre métier que celui de femme politique. Elue du conseil municipal de Besançon de 1995 à 2001, elle est conseillère régionale depuis 1998. Sophie Montel est également députée européenne.

« Dédiabolisatrice »

Mariée à Robert Sennerich, secrétaire départemental du FN dans le Doubs, Sophie Montel est une élue plutôt discrète. Dans la galaxie du FN, son profil lisse en fait l’une des figures consensuelles de la stratégie de dédiabolisation du parti d’extrême droite mise en œuvre par Marine Le Pen.

Défenseuse de l’IVG

En soutenant la contraception et l’avortement, le 1er-Mai, elle a jeté un petit pavé dans la mare de son parti et fait ressortir une fracture idéologique latente. Au FN, ces sujets sont toujours sensibles. La branche « catho » conservatrice, emmenée par Marion Maréchal-Le Pen, y est hostile. A l’inverse de la présidente du FN, qui soutient cette ligne.

« Oui, le Front National défend le droit de la femme à disposer de son corps ! » #1erMaiFN

— Sophie_Montel (@Sophie Montel)

« Nous défendons la sanctuarisation de la contraception et la non-remise en cause de l’avortement ! » #1erMaiFN

— Sophie_Montel (@Sophie Montel)

Lire aussi : Marine Le Pen, une féministe à la mémoire courte

  •  Pierre Jaxel-Truer

    Journaliste au Monde
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Plusieurs animateurs-vedette du service public quittent le groupe ou voient leur temps d’antenne réduit. De gré ou de force.

Le 4 mai, Gérard Holtz à la retraite

Gérard Holtz avec son épouse Muriel Mayette, à l’Elysée, en mai 2015.

« Je vais sortir de l’écran comme d’autres sortent de scène », a expliqué Gérard Holtz à Paris Match. Pour le dinosaure du sport de France 2, c’est l’heure de la retraite, à 69 ans. Un dernier Tour de France, cet été, et il partira en Italierejoindre sa femme, Murielle Mayette, directrice de la Villa Médicis. Une décision prise « par amour », dit-il.

Le 3 mai, Patrick Sabatier au placard

Patrick Sabatier.

A 64 ans, Patrick Sabatier sillonne les plateaux télé depuis 1976, avec son sourire plein de dents. Son émission « Mot de passe », diffusée chaque samedi en access prime time sur France 2, ne sera pas reconduite à la rentrée. Clap de fin ? L’animateur affirme avoir d’autres projets.

Le 18 avril, Georges Pernoud au repos

Georges Pernoud, à Nice.

En 2015, « Thalassa » a fêté ses 40 ans. Georges Pernoud, son célèbre animateur, file lui vers ses 69 ans. Il assure ne pas avoir mal pris que son magazine de la mer, institution de France 3, soit prié de passer à un rythme mensuel. Une préretraite heureuse, en quelque sorte.

Le 10 mars, Michel Drucker à la diète

Michel Drucker.

Il y a dix ans, Michel Drucker avait pris la place de Jacques Martin, chaque dimanche en début d’après midi, avec « Vivement dimanche », suivi en fin d’après-midi de « Vivement dimanche prochain ». Seule survivra à la rentrée la seconde partie de l’émission, dans une version un peu allongée, a annoncé le vétéran de 73 ans, qui s’est par ailleurs mis au théâtre.

Lire aussi : Michel Drucker annonce l’arrêt de « Vivement dimanche »

Le 7 janvier, Julien Lepers hors jeu

Julien Lepers.

Lorsque la direction de France Télévisions lui a annoncé qu’il ne présenterait plus « Questions pour un champion », Julien Lepers, 66 ans, s’est fâché tout rouge. Depuis, il a fait une pige sur Comédie +, tourné une pub et joué les chroniqueurs pour Cyril Hanouna. On l’a aussi vu, entre autres, au Salon des seniors de Reims.

Lire aussi : La première timide de Samuel Etienne à « Questions pour un champion »

Afin d’apporter des informations vérifiées aux migrants, le présentateur de la télévision publique grecque ERT anime chaque jour trois JT en arabe.

En quelques minutes, la fumée embrume le champ de poussière. Les centaines de silhouettes courent dans tous les sens. Derrière les barbelés, les sentinelles en noir s’agitent. Les gaz lacrymogènes frappent indistinctement hommes, femmes, enfants. Le 10 avril, Idomeni, à la frontière gréco-macédonienne, où se dresse un camp de réfugiés de 10 000 personnes, s’est embrasé. Les policiers macédoniens ont repoussé les migrants voulant forcer le passage fermé depuis deux mois. Faisant, selon Médecins sans frontières, 260 blessés.

En Grèce, les migrants peuvent désormais suivre, grâce à leur portable, les actualités les concernant. L’Ert, la chaîne nationale, et ANA-MPA, l’agence de presse gréco-macédonienne, ont mis en place des sites en arabe à leur intention (ici, dans le camp d’Idomeni).

Ce jour-là, s’ils étaient si nombreux à espérer une brèche, c’est à cause de LA rumeur. La frontière gréco-macédonienne « devait rouvrir ». Tous espéraient partir du camp insalubre.

La colère a succédé à la désillusion. « Cette rumeur dangereuse revient souvent, déplore le journaliste gréco-libanais Walid Elias, basé à Athènes. C’est avant tout pour lutter contre ça que nous avons créé ces programmes. »

Depuis le 22 mars, ce présentateur de la radio-télévision publique grecque ERT (Ellinikí Radiofonía Tileórasi), anime chaque jour trois JT en arabe. « La frontière est fermée », martèle-t-il à chacune de ses interventions consacrées aux migrants coincés en Grèce. Ces 54 000 déracinés d’Irak, d’Afghanistan, de Syrie rêvent d’Europe de l’Ouest, mais attendent dans des camps précaires ou des hôtels glauques du pays. Ne parlant pas le grec, mal l’anglais, ils s’informent généralement par bouche-à-oreille ou sur les réseaux sociaux, pour ceux qui ont les moyens d’acheter des cartes de téléphone locales avec accès Internet.

Les migrants peuvent télécharger les podcasts des journaux en langue arabe sur leur portable… Quand la connexion Internet s’y prête (ici dans le camp d’Idomeni).

Glanant des données parfois floues ou invérifiables. Un manque d’information auquel pallient les JT en arabe, que les migrants peuvent ensuite retrouver sous la forme de podcast, grâce à leur mobile, en suivant le hashtag #Ert4refugees sur Twitter et Facebook. Des rediffusions également disponibles sur le site Ert4refugees, en grec uniquement, mis en place afin d’informer plus spécifiquement les habitants sur les façons d’apporter de l’aide aux réfugiés.

Livrer des « infos pratiques » aux migrants

L’ambition des journaux en arabe est de livrer des « infos pratiques » aux migrants, insiste le présentateur, qui adopte une ligne éditoriale différente des journaux nationaux. « Je ne parle pas de la situation économique du pays, cela ne les intéresse pas ! » Il choisit d’évoquer la météo, « comme le niveau des vents, pour ceux qui seraient tentés de traverser l’Egée de la Turquie ». D’expliquer les procédures pour faire une demande d’asile, « où est-ce qu’ils doivent se rendre, quels numéros Skype contacter pour les services d’immigration ». De détailler la situation dans les camps officiels, « les conditions de vie ne sont pas bonnes, mais meilleures que dans les camps improvisés ».

Le JT en langue arabe, présenté par Walid Elias sur la chaîne grecque ERT.

Pour Petros Demetropoulos, responsable de l’agence de presse ANA-MPA (Athens News Agency-Macedonian Press Agency), informer c’est aussi donner une existence à ces exilés. Comme l’ERT, l’agence a lancé mi-mars une page d’actualités en arabe sur son site. « Les réfugiés ne sont pas des marchandises, mais des gens avec une histoire. Il faut les aider à s’intégrer, à comprendre où ils sont », explique ce Grec. S’adresser à ces exclus était pour lui devenu un « devoir professionnel ».

Alors que près d’un million de personnes ont transité par le pays, que la crise migratoire a tragiquement pris le dessus sur la crise économique. « Tous ces migrants vont rester bloqués ici peut-être des mois, voire des années. Il faut être là pour le leur expliquer », justifie Petros Demetropoulos. Le reporter n’oubliera jamais les images des femmes en pleurs, de bébés aux yeux arrondis de frayeur, progressant dans une eau boueuse.

« Il faut mettre les réfugiés en garde contre les trafics. » Petros Demetropoulos, responsable de l’agence de presse ANA-MPA

« Mi-mars, plus de 1 500 migrants ont tenté de passer la rivière entre la Grèce et la Macédoine », soupire l’homme. Trois Afghans sont décédés. Pour prévenir ce genre d’incident « indigne », « il faut mettre les réfugiés en garde contre les trafics, estime-t-il. Nous aimerions faire du contenu en farsi, pour les Afghans, mais nous n’en avons pas les moyens. »

Ces nouvelles ont encore du mal à percer chez les migrants. Il n’y a pas de télévisions et les connexions Wi-Fi mises en place dans les camps ne sont pas toujours efficaces, parfois saturées. « Avec une entreprise de télécommunications, nous y distribuerons bientôt des cartes Sim, afin qu’ils aient un accès à Internet et puissent consulter le site », annonce Petros Demetropoulos. ANA envisage aussi de lancer un compte Twitter en langue arabe. « La fréquentation des podcasts du site ERT progresse, se réjouit de son côté Walid Elias. Des Syriens, comme des Grecs, nous remercient. »

Le premier ministre Alexis Tsipras a également félicité sur Twitter les initiatives internes des deux médias publics. Mais elles ne sont pas du goût de tous, en témoignent des réactions radicales sur la page Facebook de l’ERT. « Ici, on parle grec, pas arabe », « Y a-t-il des JT grecs en Arabie saoudite ? Non, alors pourquoi fait-on des infos en arabe en Grèce ? », « Qui paie ce JT ? », cite Walid Elias.

Le 23 mars, une image de leur journal a été détournée et relayée. On pouvait y voir une présentatrice voilée. Le journaliste nuance : « Il y a des extrémistes, mais la majorité des habitants comprend l’odyssée de ces gens. Car une partie des Grecs sont eux-mêmes des descendants de réfugiés, venus de l’Anatolie. »

Ils se déchirent, mais ils restent en pleine forme. Dans le dernier opus du studio Marvel, Civil War, Captain America et ses amis la Sorcière rouge ou le Soldat de l’hiver entrent en guerre contre Iron-Man, Spider-Man et Black Widow. Une vraie lutte idéologique entre les partisans de la liberté et ceux d’un Etat fort et régulateur.

Faut-il y déceler une ressemblance avec les élections américaines ? En tout cas, cette bagarre de gros muscles plein d’idéaux fait les délices des spectateurs et donc de Disney, producteur et distributeur du film. Sur le seul premier week-end de sa sortie, le groupe a engrangé plus de 180 millions de dollars (158 millions d’euros) de recettes. Deux fois plus que le précédent Captain America, le Soldat de l’hiver, sorti en avril 2014.

Une résurrection spectaculaire

Magie du cinéma, qui dans sa version plus « intellectuelle » fait la fête à Cannes à partir de mercredi 11 mai. Si l’on compte les recettes internationales du film sorti en Europe une semaine avant les Etats-Unis, Disney a déjà amassé plus de 400 millions de dollars et donc remboursé en quelques jours l’intégralité du coût de production du film (250 millions plus les frais de lancement).

Et ce n’est pas fini. Après Le Livre de la jungle et Zootopia en début d’année, les fans pourront retrouver cet été une nouvelle version d’Alice de l’autre côté du miroir et la suite de Nemo, du studio Pixar. Les analystes estiment que Disney pourrait enregistrer la plus belle année de son histoire avec une part du marché américain qui approchera les 30 %. Du jamais-vu.

Une résurrection spectaculaire pour la plus célèbre entreprise de média du monde. Entre 1995 et 2005, la firme ne parvient pas à enrayer le déclin progressif de ses dessins animés, en panne d’imagination et de talents. Arrivé en 2015, son PDG, Bob Iger, a eu l’intelligence de régénérer l’entreprise par l’acquisition de Pixar, auteur des célèbres Toy Story, et de placer son patron John Lasseter à la tête de l’ensemble. Puis, ont suivi les acquisitions du studio Marvel et de Lucas Films, le papa des Star Wars. Depuis 2010, la société enchaîne les succès avec une régularité stupéfiante. Chaque année, à l’exception de 2014, elle sortira des films dépassant le milliard de dollars de recettes par an.

Bien sûr, le cinéma ne représente plus que 15 % du chiffre d’affaires de l’entreprise, mais il est le cœur du réacteur, indispensable au bon fonctionnement de ses très lucratives divisions de ventes de jouets et de parcs d’attractions. Cela est d’autant plus nécessaire que le pilier télévision, autrefois vache à lait du groupe, vacille. Les analystes n’ont pas du tout aimé que lors de la présentation des résultats trimestriels, mardi 10 mai, la firme a révélé perdre des abonnés sur sa chaîne câblée sportive ESPN et du chiffre d’affaires publicitaire sur son réseau ABC. Face à la tempête qui secoue le monde de la télévision aux Etats-Unis, Captain America et son bouclier étoilé n’ont pas encore trouvé la parade.

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Utiliser des drônes pour évaluer les zones dévastées par le séisme du 16 avril, une technologie pointue qu’un groupe d’archéologues franco-équatoriens a mise au service de l’armée.

Benoît Duverneuil, fondateur d’un groupe de recherche en archéologie franco-équatorien, envoie une petite flotte de drones pour réaliser des opérations de secours et des études après le tremblement de terre en Equateur.

Vue du ciel, la côte équatorienne offre un spectacle apocalyptique. Ses villages pittoresques ont cédé la place à des monceaux de gravats, sur lesquels quelques rares poteaux électriques dispersent leurs fils aux quatre vents. Au milieu des ruines, les secours s’organisent. Trois semaines après le séisme qui a ravagé le nord-ouest de l’Equateur, le 16 avril, l’heure n’est plus à la recherche des survivants. Elle est à l’évaluation des dégâts… considérables.

Entre les routes à déblayer, les convois à protéger et les populations à déplacer, l’armée ne sait plus où donner de la tête. Alors elle a décidé de la lever en direction de drôles de véhicules volants : des drones. Pilotés à distance par des bénévoles, ces petits aéronefs accompagnent les militaires depuis une quinzaine de jours dans les zones les plus inaccessibles du pays.

De l’imagerie haute précision

A l’origine de cette alliance atypique, une initiative d’un groupe de recherche en archéologie franco-équatorien, spécialisé dans l’exploration et la technologie : l’Aerial Digital Archaeology & Preservation (ADAP). « Au moment où le tremblement de terre s’est déclenché, l’un de nos formateurs, Dorian Roque, s’apprêtait à sensibiliser les archéologues de Quito à l’utilisation des drones pour recenser et protéger le patrimoine local, se souvient Benoît Duverneuil, fondateur du groupe de recherche. La catastrophe a changé sa mission ! »

Lire aussi : Le séisme en Equateur a fait plus de 640 morts

Et cet analyste du big data de raconter que, sitôt les secousses terminées, l’ADAP a rassemblé une équipe de pilotes professionnels et mobilisé ses réseaux : « Nous avons très vite obtenu l’aide matérielle de fabricants de drones aériens et aquatiques (DJI et OpenROV) ainsi que celle de sociétés de logiciels de mapping (DroneDeploy). Le réseau international UAViators nous a, de son côté, permis d’obtenir de l’imagerie satellitaire de haute précision. »

Reconstruction 3D à partir de photographies HD et de données géo-spatiales

Depuis, une douzaine d’engins munis de caméras et de capteurs thermiques survolent les lieux les plus sinistrés. « L’ampleur de la tâche est à l’image des dégâts, immense, surtout si l’on considère les risques de répliques, voire de l’éruption du volcan Cotopaxi », estime Benoît Duverneuil. Son groupe de bénévoles consacre donc une partie de son énergie à transmettre ses compétences afin que les unités locales soient en mesure de poursuivre la mission après leur départ.

« Notre intervention vise à dresser un état des lieux rapide, sécurisé et à moindre coût. » Benoît Duverneuil

Du matin au soir, les pilotes se relaient pour envoyer des drones sur les bâtiments identifiés à partir des plans fournis par l’Institut géographique militaire. « Notre intervention vise à dresser un état des lieux rapide, sécurisé et à moindre coût, explique-t-il, pour aider les équipes à se déployer à partir de photos transmises en temps réel. » Intégrés à des logiciels ultraperformants, les clichés aériens permettent en effet de recréer les positions géographiques et les volumes exacts de chaque élément ciblé. Le rendu est manipulable à merci par les autorités, qui peuvent ensuite zoomer. « La définition des images est si élevée qu’il est possible de mesurer une fissure dans la structure d’un château d’eau ou sous un pont », affirme Benoît Duverneuil. Inestimable, cette technologie permet aux architectes d’évaluer précisément les risques… sans en prendre. Une aide précieuse pour l’Equateur qui déplore déjà beaucoup trop de morts.

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Par Sandra Franrenet

A Erevan, George Clooney a décerné le premier prix récompensant ceux qui « sauvent des vies en mettant en péril la leur » à la Burundaise Marguerite Barankitse.

Invité à la commémoration du génocide arménien à Erevan, George Clooney a remis le prix Aurora à la Burundaise Marguerite Barankitse.

L’acteur américain George Clooney a été accueilli en chef d’Etat pour la cérémonie de commémoration des 101 ans du génocide arménien et s’est livré de bonne grâce à tous les ­exercices afférents : dépôt de gerbe à la mémoire des victimes, rencontres avec des officiels et visite des caves du fameux brandy arménien, l’Ararat, que les locaux s’obstinent à appeler « cognac » malgré les récriminations françaises. Le soir, devant un impres­sionnant parterre de personnalités internationales et locales, c’est aussi lui qui a remis le prix Aurora. Cette distinction, dont c’était la première édition, a été créée par des descendants des rescapés du génocide pour récompenser les « héros ordinaires » d’aujourd’hui.

« Si nous sommes là, c’est parce que quelqu’un a risqué sa vie pour sauver celle de nos grands-parents », martèlent en cœur les trois fondateurs du prix : Vartan Gregorian, président de la ­Carnegie Foundation de New York, l’ex-banquier d’affaires Ruben Vardanyan de Moscou et le spécialiste de capital-risque Noubar Afeyan.

La philosophie que partagent ces trois philanthropes tranche quelque peu avec le discours dominant en Arménie, et dans la diaspora, sur la mémoire du génocide. Tous les ans, les commémorations se déroulent sous le signe du slogan « Je me souviens et je réclame » : cette phrase, écrite dans plusieurs langues, accompagne les pèlerins dans leur marche vers le mémorial aux victimes, édifié sur les hauteurs d’Erevan. « Nous sommes bien ­évidemment attachés à la mémoire, nous sommes aussi pour la reconnaissance pleine et entière du génocide, notamment par les Etats-Unis, où deux d’entre nous résident. Mais nous voulons regarder vers l’avenir, passer à quelque chose de plus positif et constructif », poursuit Noubar Afeyan. Ainsi leur est venue l’idée, il y a un an, peu avant la commémoration du centenaire du génocide, de créer un prix récompensant ceux qui « sauvent des vies en mettant en péril la leur ».

Cérémonie de commémoration du génocide arménien le 24 avril à Erevan.

Le prix vise aussi à rendre ­hommage à ceux qui, toujours au péril de leur vie, contribuent à alerter l’opinion publique sur les atrocités commises lors des conflits modernes. A l’image d’Aurora Mardiganian (1901-1994). Seule survivante d’une famille arménienne décimée, cette jeune femme, émigrée aux Etats-Unis au début du siècle dernier, a grandement contribué à la prise de conscience internationale de l’ampleur des massacres commis contre les Arméniens sous l’Empire ottoman.

Plutôt que perpétuer l’image d’une Arménie « qui pleure ses victimes », Vartan Gregorian, Ruben Vardanyan et Noubar Afeyan ne cachent pas leur ambition de promouvoir un pays jeune qui veut – et peut – à son tour « faire le bien ». Comme pour ­s’acquitter d’une dette historique mais aussi pour tourner la page de la victimisation. « Notre message au monde est que nous sommes toujours là, debout et forts », renchérit Ruben ­Vardanyan. Pour sa première édition, le prix Aurora a été décerné à la Burundaise Marguerite Barankitse, fondatrice de la Maison Shalom, une association accueillant les orphelins des massacres ethniques qui ont ravagé son pays. Menacée de mort, elle vit aujourd’hui en exil. « Maggy » a reçu, très émue, un chèque de 100 000 dollars (87 000 euros) et dispose d’un million supplémentaire destiné à aider des organisations ayant inspiré son action.

C’était son premier voyage en Arménie, dont elle ignorait à ce jour presque tout de l’histoire dramatique.

Le milliardaire François Pinault a annoncé l’ouverture d’un musée à Paris, en 2018.

Le milliardaire François Pinault entouré de son fils et de son petit-fils, le 27 avril, à l’Hôtel de Ville de Paris.

« On m’a prévenu il y a quelques jours. J’étais en vacances, j’ai pu venir. » François Pinault junior, petit-fils de l’homme d’affaires et collectionneur, ne s’attendait pas à son quart d’heure médiatique. Couvé par l’état-major du milliardaire breton, ce jeune homme de 18 ans, qui doit passer son bac cette année, était aux premières loges lors de l’annonce, le 27 avril, de l’ouverture d’une antenne de la collection Pinault à la Bourse de commerce à Paris en 2018.

« Avec mes frère et sœur, on a assisté pendant quinze ans à la passion dévorante de notre père. » François-Henri Pinault

C’est entouré de tous ses proches, en particulier donc de son petit-fils et surtout de son fils François-Henri, que François Pinault a voulu marquer son ancrage à Paris, dix ans après avoir renoncé au projet sur l’île Seguin, à Boulogne-Billancourt. Le bail de la concession signée avec la Ville, d’une durée de cinquante ans, couvre deux générations. Celui établi en 2006 avec la municipalité de Venise pour le Palazzo Grassi s’étire sur 99 ans. « Avec mes frère et sœur, on a assisté pendant quinze ans à la passion dévorante de notre père. L’histoire personnelle est devenue une aventure familiale. On ne fait pas ça pour cinq ou dix ans. J’ai pris l’engagement envers lui pour que ça aille au-delà d’une génération », a martelé François-Henri Pinault. Et d’ajouter : « Mon père ne voulait pas prendre cette décision seul. De façon naturelle, il m’a dit : “C’est à toi de le faire”. Et j’ai mon fils, François, qui poursuivra l’aventure. » Une aventure parisienne qui promet d’être coûteuse – on parle de 15 millions d’euros pour les deux premiers exercices.

Lire aussi : François Pinault investit la Bourse

La dépense n’a pas l’air d’émouvoir le PDG de Kering qu’on a rarement vu aussi ­rayonnant et disert que sous les lambris de l’Hôtel de Ville à Paris ce jour-là. Bien qu’il déclare être« né dans l’art », François-Henri Pinault admet ne pas avoir la « passion dévorante » de son aîné. Les œuvres qu’il achète restent dans « la sphère familiale » : elles ont seulement vocation à orner ses murs. L’homme ­d’affaires reconnaît une proximité avec des artistes tels que Damien Hirst et ­Youssef Nabil – tous deux proches de son épouse, l’actrice Salma Hayek –, Adel Abdessemed, Thomas Houseago ou ­Martial Raysse. Récemment, il a acheté une toile de Paul Rebeyrolle. Il en rit presque : tous ces créateurs figurent déjà dans la collection paternelle qui a clairement modelé son goût.

Un nouveau chapitre

Officialisé à l’hôtel de ville de Paris, le passage de témoin par anticipation n’est pas sans rappeler celui opéré voilà treize ans dans le champ des affaires. Lorsqu’en 2003, François Pinault décide de transmettre son fauteuil de président de PPR (rebaptisé Kering) à son fils, il lui offre un porte-clefs avec trois cercles en or entrelacés. Sur l’un était gravé son nom, sur le deuxième celui du fils. Le troisième ne comportait aucune inscription. Comme s’il incombait désormais à l’héritier d’écrire un nouveau chapitre. Gageons qu’il en sera de même dans quelques décennies sur le terrain de l’art. « A l’avenir, je m’impliquerai, affirme François-Henri Pinault. Je n’ai pas son expertise pour détecter, décider d’acheter ou pas. Mais je m’organiserai, m’entourerai, pour que ça continue. »

Malgré le sacre du film d’Abdellatif Kechiche aux Césars 2005, le jeune acteur n’a pas réussi à donner une suite à sa carrière. Il raconte son retour à la vie de galère dans un livre.

Le comédien Osman Elkharraz, révélé dans "L'Esquive", en mars 2005.

La dernière fois que vous avez vu Osman ­Elkharraz, c’était en 2004, il avait 13 ans. L’Esquive, le deuxième film d’Abdellatif Kechiche (La Graine et le Mulet, La Vénus noire, La Vie d’Adèle), venait de sortir, sa bouille était collée sur les flancs de bus. Osman, alias Krimo, tenait le premier rôle masculin au côté de Sara Forestier. Tous deux récitaient du Marivaux. Elle a poursuivi sa carrière, comme Sabrina Ouazani, une autre actrice du film. Pas lui.

Bande-annonce de « L’Esquive » (2005)

Malgré le sacre de L’Esquive aux Césars (quatre statuettes remportées) en 2005, Osman est retourné à la galère d’où Kechiche l’avait – un peu – sorti. Ces dernières années, alors que les autres enchaînaient les rôles, lui a « dormi dehors, dormi dans des caves, dormi dans des Lavomatique, pas dormi de la nuit ». A 26 ans, il publie Confessions d’un acteur déchu. De L’Esquive à la rue, coécrit par Raymond Dikoumé (éditions Stock, 232 p., 18,50 euros, sortie le 11 mai). Et avoue avoir« la rage » contre le milieu du cinéma, qui ne laisse aucune chance aux types comme lui. Contactés à l’occasion de la publication de son livre, ses anciens « collègues » de tournage sont tous aux abonnés absents.

Livré à lui-même dès l’âge de 9 ans

Osman Elkharraz a grandi à Colombes, dans les Hauts-de-Seine. Livré à lui-même depuis la mort de sa mère, quand il a 9 ans, il est orphelin à 12, lorsque son père, incarcéré au Maroc, meurt d’un cancer. Son grand frère a beau trimer chez Attac et garder des bécanes volées dans le garage du pavillon familial, la fratrie apprend vite à se passer d’eau et d’électricité. Pas de chauffage l’hiver, pas de télé le soir, pas de lumière, pas de linge propre et beaucoup d’absences à l’école. « A l’époque, j’y allais quand il pleuvait », lâche-t-il aujourd’hui, entre deux bâillements, laconique et jet-lagué par une vie sans répit. Il fait ses premiers cambriolages à 11 ans. Des barbecues dans la cour de la maison à 3 heures du matin.

En 2002, il est remarqué par des responsables de casting alors qu’il traîne à La Défense, chez Auchan. La production cherche une équipe de jeunes acteurs non professionnels. Osman s’impose, comme une évidence. S’ensuit un tournage sous extrême tension, comme souvent, semble-t-il, avec Kechiche. Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos, vedettes de La Vie d’Adèle couronné à Cannes en 2013, avaient d’ailleurs créé la polémique en évoquant ses méthodes tyranniques.

Sauf qu’à la différence des deux actrices, le gosse n’était pas habitué à obéir, ni à s’écraser. Osman a 13 ans, « pas de limites », pas de manières, pas de plan de carrière, et il incendie Kechiche devant toute l’équipe. Le réalisateur le calme, histoire de sauver son premier long-métrage. Mais le gamin sera largement évincé de la promo et, lors de la soirée des Césars en 2005, il sera le seul à ne pas toucher la statuette du meilleur film qui passe de main en main…

De casting en casting

De toute façon, entre-temps, la vie a repris son cours, et Osman Elkharraz, 14 ans, passe le plus clair de son temps au sommet d’une tour de La Défense à vendre du shit. Il faut bien vivre, la maison est vendue, et son cachet bloqué jusqu’à ses 18 ans (il ne percevra alors que 2 800 euros sur les 8 000 qu’il attendait, faute d’être allé les réclamer en justice comme les autres). Mais il ne lâche pas, tente le cours ­Florent, joue le jeu des castings, un peu dégoûté.

« J’ai croisé Kechiche. Il me regardait même pas, il s’éloignait en me parlant… » Osman Elkharraz

Officiellement, aujourd’hui, il attend toujours que Jamel Debbouze, rencontré un jour Porte de Clignancourt, le reçoive comme promis. En vrai, il s’est fait une raison : « Si tu veux ­tourner, faut savoir te vendre. (…) J’ai vu des gens se dandiner, ça allait trop loin. C’était plus de la lèche, c’était de la pornographie », écrit-il. Il a proposé à Kechiche, qu’il a recroisé un jour qu’il faisait le coursier, de ­tourner un film sur sa vie : « Il me regardait même pas, il s’éloignait en me parlant, en me disant que je pouvais revenir prendre un café… », lâche Elkharraz, qui espère que son livre ­intéressera un autre scénariste.

Installé dans le 20e arrondissement de Paris, il a repris le deal – des livraisons Colombes-Pont de Neuilly (« que du stress ») –, fait ses cinq prières par jour, et claque son cash dans des séjours au Maroc, le pays de son père.


Ministre de l’agriculture et porte-parole du gouvernement,Stéphane Le Foll a lancé un mouvement au nom surprenant : «Hé oh la gauche ! » Avec ses deux interjections, son groupe nominal et son point d’exclamation, il évoque plus les nains de Blanche-Neige que les mineurs de Carmaux. Je laisserai aux exégètes le soin de « décrypter » cette initiative, qui pourrait être la première étape d’une mise sur orbite électorale de l’actuel président.

Mais je procéderai volontiers à une analyse sémantique. La première interjection, « hé », sert à appeler, à attirer l’attention (« Hé, vous, là-bas ! »). La seconde, « oh », semble exprimer une forme de supplication (« Oh, s’il vous plaît !). Mon tout, lui, ressemble à une erreur de communicants, du genre : « Au secours ! la droite revient. »

En matière de slogans, les socialistes ont été plus ou moins inspirés. De l’historique « La force tranquille » de 1981 au calamiteux (pour la syntaxe) « Ségolène Royal pour que ça change fort ! », en passant par l’obscur « Avec Lionel Jospin c’est clair », les mots ont pu ou n’ont pas su convaincre. L’Histoire l’a prouvé : s’il arrive que les mots puissent beaucoup (le « Yes, we can » de Barack Obama), ils ne peuvent pas tout, par exemple face aux bombes (le « No pasarán ! » des républicains espagnols).

En France, les propositions simples comme des évidences n’ont pas toujours conduit au succès : « Un président pour tous les Français » (Alain Poher, 1969), « Un président pour tous les Français » (François Mitterrand, 1974). Les affirmations qui n’engagent que ceux qui les écoutent (« Ensemble, tout devient possible », « Le changement, c’est maintenant ») peuvent accompagner une victoire (Nicolas Sarkozy, en 2007, François Hollande, en 2012). Ne tirons aucune conclusion. Rappelons seulement que Stéphane Le Foll a assorti verbalement le baptême de son mouvement d’un « Ne te trompe pas, la droite prépare l’alternative ». L’« alternative » ? La langue du ministre n’aurait-elle pas fourché, afin de ne pas prononcer le mot « alternance », qui évoque trop la défaite ?

Le Monde | 03.05.2016 à 17h16 • Mis à jour le03.05.2016 à 17h18 |Par Marc Beaugé (M Le magazine du Monde)

[Chronique] L’ex-secrétaire d’Etat de Nicolas Sarkozy est candidate à l’élection présidentielle. Sans parti. Sans programme. Sans espoir. Mais pas sans style.

En 2007, le nœud du problème


Elle a 30 ans et on ne parle que d’elle. Tout juste nommée secrétaire d’Etat aux droits de l’homme, Rama Yade plaît, fascine, irrite, interroge. Qui est-elle, au fond ? Un alibi diversité, une future grande ou juste une intruse dans un gouvernement bien de droite ? Sur ce point-là, elle-même entretient l’ambiguïté. Mariée à un militant PS, elle se dit plus sensible au charisme de Nicolas Sarkozy qu’aux valeurs de la droite. Et puis elle porte un nœud lavallière, accessoire très prisé, au XIXe siècle, des artistes, des étudiants et des intellectuels. Mais ceux de gauche, uniquement. Tiens, tiens…

En 2008, le cuir sur la main


Les mois passent et les questions demeurent. Mais enfin ! Qui est cette jeune effrontée qui boycotte une visite en Chine et fustige la venue en France de Kadhafi ? Rama Yade l’insoumise ne manque pas d’aplomb. Ni d’idées. Pour ne plus souffrir l’infamie de toucher la main d’un dictateur à qui il faut vendre des avions ou acheter du pétrole, elle ne quitte plus ses gants de cuir. Tiré par les cheveux ? A peine.

En 2010, direction le tatami


Ce qui devait arriver arriva. A force d’insoumission, Rama Yade est tombée en disgrâce. Un peu. Puisque sa cote de popularité dans l’opinion reste élevée, on lui a trouvé un placard au ministère des sports. La jeune femme s’implique dans son nouveau rôle et va même jusqu’à revêtir un pantalon de judoka. Au conseil des ministres, l’étonnement est grand. Sauf chez David Douillet. Et chez Roselyne Bachelot, la ministre de tutelle de Rama Yade, lancée dans un combat au corps-à-corps avec l’ambitieuse.


En 2012, K.O. en carreaux


Plus forte en prises de positions qu’en prises de judo, elle a perdu le combat. Fini le gouvernement, finis les spotlights, finie la belle vie et bonjour le Parti radical. Autant le dire : Rama Yade est sur le carreau. En l’occurrence, il s’agit d’un tartan, tissu iconique des punks de 1977. « No Future » pour l’ancienne secrétaire d’Etat ?

En 2016, toujours pas blazée


Quatre ans plus tard, Rama Yade « is back ». Sur TF1, elle est même venue annoncer sa candidature à l’élection présidentielle, vêtue d’un blazer à rayures qui interroge les fins observateurs : rayures tennis, rayures craie, rayures régate, rayures ­Bengale ou rayures bonbon ? Non, rayures bâton. Rien de mieux pour se fairebattre.

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  • Marc Beaugé (M Le magazine du Monde)