Après le scandale de la dernière cérémonie, où aucun Noir n’était finaliste, l’Académie hollywoodienne s’ouvre aux femmes et aux minorités. Et se ferme aux réceptions trop cossues.

Un homme blanc : le profil type du lauréat aux Oscars.

C’est officiel, l’Académie des Oscars se réforme. Elle l’a annoncé le 30 juin, créant une forme d’émoi dans le microcosme hollywoodien. Cette évolution est un pas en avant gigantesque pour une institution connue pour son conservatisme et sa frilosité. Mais, comme toute révolution dictée par la panique, ce changement, décidé dans une évidente frénésie, part dans tous les sens, parfois en dépit d’un certain bon sens. Il est d’abord apparu nécessaire – à la suite de la récente controverse sur les nommés et gagnants des Oscars, largement masculins, tous blancs – de modifier la sociologie des votants et d’ouvrir la porte à des représentants de différentes minorités, Noirs et femmes en tête.

C’est ainsi que 683 nouveaux membres ont été cooptés par l’Académie et pourront, dès 2017, voter pour les Oscars. Parmi eux, comme l’atteste la statistique fournie par l’Académie, 46 % de femmes et 41 % issus des minorités noire, latino, asiatique. Mais, à peine ce changement institué, plusieurs observateurs en ont pointé les limites. La proportion de membres de l’Académie issus des minorités passe de 8 à 11 %, celle des femmes de 25 à 27 %. Soit une modification à peine perceptible, du moins pour l’année prochaine. Car, d’ici à 2020, le conseil de l’Académie devrait doubler les nombres de femmes et de représentants des minorités ethniques.

Un raout à Hollywood peut-il décemment se tenir sans champagne de grande cuvée ?

Autre souci : la culture cinématographique de ces nouveaux votants. Venus du cinéma indépendant, ne travaillant guère pour les studios hollywoodiens, ils auraient tendance à voter pour des films moins grand public, à ne pas porter leur suffrage sur des stars établies. Ce n’est guère un souci en soi. Mais, si l’on considère que le sens ultime des Oscars réside dans la soirée de remise des récompenses, en février, retransmise à grands frais par la télévision américaine, que se passerait-il en cas de brutale chute d’audience faute des stars promises ?

Le caviar prohibé

L’Académie impose également un autre challenge à ses anciens et nouveaux membres : le défi des petits fours. Il est désormais interdit de participer à une réception dont le luxe serait trop ostentatoire, au risque de se voir suspendre un an, voire à vie en cas de récidive. Les réceptions organisées par les producteurs durant la campagne des Oscars sont une façon de s’attirer les voix des votants, dans ce qui reste une élection, avec les jeux d’influence qu’elle suppose. Sauf que les mots ont parfois un sens difficile à préciser. Qu’est-ce qu’un « luxe ostentatoire » ? On imagine que le caviar l’est, mais le saumon fumé ? Se rendre à un cocktail à Hollywood, c’est la promesse assurée de boire un champagne grand cru et de goûter aux mets des meilleurs traiteurs. Il n’existe pas de moyen terme, dans cette ville tout au moins. L’attrition reste un concept inconnu à Hollywood.

Consciente du dilemme, l’Académie conseille désormais à ses membres de la consulter avant de se rendre à une quelconque fête. Sangria ? Feu vert. Vin millésimé ? Interdit. La charcuterie grecque, c’est oui ; le caviar, c’est non. La salade de céleri suscite l’enthousiasme, les coquilles Saint-Jacques l’anathème. Sauf qu’à Hollywood c’est caviar et champagne ou rien.

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