Un entrepreneur ultrareligieux a construit une réplique de la mythique embarcation, en vue de « diffuser le message chrétien ».

L’été promet d’être biblique dans le Kentucky. Non pas que les abords champêtres de la petite ville de Williamstown aient des allures de mont Ararat. Mais c’est là qu’un entrepreneur très chrétien a choisi de poser une réplique « grandeur nature » de l’arche de Noé, dont l’ouverture au public était prévue le 7 juillet. L’œuvre est colossale : longue comme un terrain de foot et demi, haute de sept étages, elle s’appuie sur une charpente de bois qui serait la plus grande jamais construite aux Etats-Unis.

Les Amish, réputés pour leur savoir-faire en menuiserie et ébénisterie, ont prêté main-forte aux ambitions de Ken Ham, le promoteur de ce projet 100 % créationniste. Il fallait bien cela pour reconstituer le refuge qui, selon la Bible, sauva la Création du déluge et le monde des péchés. Loin des centaines d’espèces qu’y entassèrent Noé et sa famille, seules trente d’entre elles ont finalement trouvé leur place dans l’arche de M. Ham. Mais au-delà des classiques ours, girafes et moutons, le public pourra admirer un couple de… Tyrannosaurus Rex. Ce qui mérite une explication.

La Bible vue comme un livre d’histoire

Pour M. Ham, comme pour nombre de croyants les plus orthodoxes, la Bible est un livre d’Histoire, avec un grand « h » et sans « s » : Dieu créa le monde en six jours il y a six mille ans ; depuis, hommes et animaux n’ont connu que de très légères évolutions. Rien d’incongru donc à ce que les dinosaures aient côtoyé le sauveur de l’espèce humaine. Et qu’un arche-musée en atteste.

« Ici, ce ne sera pas le monde de Disney, où les gens viennent pour s’amuser. Le but est religieux. »

Ken Ham, promoteur du projet

Car, pour M. Ham, l’intention est claire : « Ici, ce ne sera pas le monde de Disney ou d’Universal, où les gens viennent pour s’amuser. Le but est religieux », a-t-il récemment détaillé dans le New York Times. Comme au Musée de la Création, qu’il a fondé il y a neuf ans à quelques dizaines de kilomètres de l’arche, ou dans le matériel pédagogique dont il inonde des centaines d’églises sous le label explicite « Réponses dans la Genèse », il s’agit ici de diffuser le « message chrétien ».

Ou en tout cas, un certain message chrétien. Car, si 42 % des Américains croient toujours que Dieu a créé les humains dans leur forme actuelle, selon un sondage Gallup de 2014, tous ne sont pas pour autant convaincus que cette œuvre a pris six jours, et une bonne partie accepte la théorie de l’évolution. Ken Ham et ses soutiens appartiennent à un groupe de croyants particulièrement réfractaires à cette idée. Affolés par la « sécularisation » et les innombrables « péchés » de la société actuelle, ils dénoncent sans relâche l’avortement, le mariage gay et l’athéisme.

Une reproduction de dinosaure à l’intérieur de la réplique de l’arche de Noé du parc à thème « Ark Encounter », à Williamstown le 5 juillet 2016.

Avantages fiscaux et subventions

A l’embauche, les salariés de l’arche ont dû signer une « déclaration de foi », qui revenait à exclure les homosexuels. Malgré une plainte de l’Etat du Kentucky, qui, au vu de ces exigences, rechignait à accorder des avantages fiscaux à ce projet religieux non exempt de visées commerciales, la ­justice a donné raison au patron précautionneux et les subventions ont été confirmées par le tribunal. Elles ont contribué au budget de 102 millions de dollars nécessaire à l’entreprise.

Des scientifiques, des associations athées et des chrétiens moins rigoristes mettent en garde contre les dommages que pourrait causer sur l’éducation de jeunes cerveaux une sortie dominicale à l’arche. Surtout si, comme l’espère M. Ham, elle est couplée avec une visite au Musée de la Création, qui a déjà vu passé plus de 2 millions de visiteurs. Et si les enfants viennent d’Etats tels que le Texas, le Missouri ou l’Alabama, où les programmes scolaires ont toute ­latitude pour une « analyse critique » de la théorie de l’évolution.

[Chronique] Son mari porte le pantalon au nombril. Mais, en termes de style, ce n’est pas lui qui porte la culotte. Ici, en 1975, Bernadette Chirac a la tête haute. Que cherche-t-elle comme ça, du regard ? Du réconfort, peut-être. A 42 ans, elle est en souffrance. L’homme qu’elle a épousé dix-neuf ans plus tôt vient d’être nommé premier ministre et s’est épris d’une journaliste du « Figaro ». Elle le sait, elle l’a vu. Son couple vacille mais Bernadette soigne les pparences. Brushing bouffant et twin-set Chanel (regardez le double C sur les boutons) : pour une fille de la haute, née Chodron de Courcel, voilà des valeurs refuges.

Nicolas Hulot, le 31 mai 2016.

« Après mûre réflexion et nombre de consultations depuis plusieurs mois, j’ai décidé de ne pas être candidat à l’élection présidentielle »,a annoncé l’écologiste Nicolas Hulot, mardi 5 juillet.

« Ce que je vois, c’est une société inquiète, fragmentée et désabusée par les crises qui la traversent et par l’absence de réponse politique. Mais ce que je vois aussi, c’est un élan pour inventer un monde meilleur, plus juste et solidaire. Ce que je veux, c’est fédérer et réconcilier ces aspirations et ces porteurs de solutions autour d’un même projet pour la France. »

« Ce que je ne peux pas, c’est endosser l’habit de l’homme providentiel et présidentiel. Je ne me sens ni suffisamment armé, ni suffisamment aguerri pour cela », poursuit l’ancien envoyé spécial de François Hollande pour la protection de la planète.

Des sondages favorables

Un appel en faveur de sa candidature avait pourtant recueilli en quelques semaines plusieurs dizaines de milliers de signatures. Des sondages le créditaient d’un score compris entre 9 et 11% au premier tour de la présidentielle.

Moins d’un Français sur trois (31%) souhaitait cependant que l’écologiste participe à cette élection, même s’il jouit d’une bonne image dans l’opinion, selon un sondage Odoxa pour Le Parisien/Aujourd’hui publié en mai.

« Une primaire s’impose »

Les regards se tournent désormais vers Europe Ecologie-Les Verts, qui souhaitait une candidature Hulot et n’entend pas participer à la primaire de la gauche initiée par le PS et qui devrait se dérouler en janvier. Le secrétaire national d’Europe écologie-Les Verts (EELV), David Cormand, a immédiatement réagi sur Twitter :

Triste de la décision de @N_Hulot mais respectueux de son intégrité et de son engagement désintéressé et constant.

— DavidCormand (@David Cormand)

Matthieu Orphelin, un très proche de Nicolas Hulot, a confié sur Twitter sa déception, mais a précisé qu’il respectait sa décision. « Nicolas Hulot ne sera pas candidat en 2017. Je respecte sa décision. Comme beaucoup, j’aurais aimé qu’elle soit autre », peut-on lire sur son compte Twitter.

La sénatrice EELV du Val-de-Marne Esther Benbassa est bien moins complaisante envers Nicolas hulot, qu’elle qualifie de « diva » :

Nicolas #Hulot veut bien jouer les divas, mais pas « l’homme providentiel et présidentiel ». On lui demandait juste d’incarner l’#écologie…

— EstherBenbassa (@Esther Benbassa)

Pour Karima Delli, députée européenne EELV, cette décision met en lumière la nécessité d’une primaire interne à EELV :

#2017 après le retrait de Nicolas #Hulot plus que jamais une primaire des #ecolos s’impose

— KarimaDelli (@Karima Delli)

Suspense

Cela faisait plusieurs semaines que Nicolas Hulot entretenait le suspense autour de sa candidature, qu’il avait promis de rendre publique à l’automne au plus tard. Dans son entourage, comme chez les écologistes, nombreux sont ceux qui le poussaient à se présenter. Une petite équipe gravitait déjà autour de lui : des politiques, comme Pascal Durand, ex-patron d’EELV, l’ancien parlementaire européen (EELV) Jean-Paul Besset, des intellectuels, tel le philosophe Dominique Bourg… Cécile Duflot, qui ne cache pas ses ambitions présidentielles, a toujours assuré qu’elle lui laisserait la place s’il décidait d’être candidat. Dans les sondages, il affichait une popularité insolente, entre 9 % et 11 % des intentions de vote.

Lire aussi : La valse-hésitation de Nicolas Hulot pour 2017

L’ancien animateur d’« Ushuaïa » demeurera donc à la tête de la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme (FNH). Cette dernière avait changé de nom en 2011 – elle était devenue Fondation pour la nature et l’homme – lorsque son président avait démissionné de ses fonctions pour se lancer dans la bataille de la primaire écologiste pour la présidentielle de 2012. Après son échec face à Eva Joly, il en avait repris les commandes.

Lire aussi (en édition abonnés) : Présidentielle : Nicolas Hulot poussé par ses « amis » à accélérer

Sous ses faux airs de série B, ce film de 1965 a inspiré de nombreux cinéastes, dont Ridley Scott pour « Alien ». Une épopée à redécouvrir en version restaurée dès le 6 juillet.

Des astronautes qui débarquent sur une planète et se retrouvent confrontés à une forme de vie inconnue, c’est le scénario de « La Planète des vampires »… ou celui d’« Alien » ?

Découvrir La Planète des vampiresaujourd’hui, cinquante ans après son tournage, c’est se lancer dans une sorte d’aventure archéologique. A première vue, tout y semble daté : les décors, les costumes, le jeu des acteurs, les effets spéciaux… Pourtant, malgré cet ensemble ripoliné et exubérant d’esthétique sixties, difficile de ne pas être frappé par l’impression que ce film a façonné une partie de notre imaginaire commun, de notre envie de nous projeter dans des épopées intergalactiques.

On pouvait ignorer son existence, et ce d’autant plus facilement qu’il n’est jamais vraiment sorti en France, n’ayant fait l’objet que d’éditions vidéo ou DVD peu fameuses jusqu’à sa récente restauration. Impossible, en revanche, de ne pas connaître ceux qu’il a inspirés plus ou moins directement. Au premier chef, Ridley Scott avec sa saga Alien et sa préquelle, Prometheus. Plus généralement, des pans entiers de la science-fiction actuelle, quand un vaisseau débarque sur une planète pas toujours accueillante.

L’alliance d’Edgar Poe et de Youri Gagarine

C’est un euphémisme dans le cas de La Planète des vampires (Terrore nelle spazio, en version originale). Tourné par Mario Bava au milieu des années 1960, il est une adaptation de la nouvelle Una notte di 21 ore (« une nuit de 21 heures »), de Renato Pestriniero. Une équipe d’astronautes atterrit dans un monde désertique, envahi de fumées et de lumières rosées. A peine le vaisseau se pose-t-il que tous se mettent à se battre, mus par une force étrange. Une fois calmés, ils sortent explorer ce nouveau monde et découvrent un autre vaisseau échoué, peuplé de cadavres qui prennent vie et veulent les dévorer. Toute la réussite tient à cette capacité à mélanger des univers, à faire frissonner comme dans un film d’horreur tout en donnant à rêver de conquête spatiale. Bref, à réunir Edgar Poe et Youri Gagarine.

« La Planète des vampires » dans sa version de 1965

La Planète des vampires est le seul de la très dense filmographie de Mario Bava à s’inscrire ouvertement dans le registre de la science-fiction. Né en 1914 à San Remo, mort en 1980 à Rome, ce réalisateur aura été une sorte d’homme à tout faire du cinéma de son pays, tour à tour chef op’, décorateur, auteur, cocréateur d’un genre, le « giallo » (ou thriller à l’italienne), parrain de toute une mouvance dont Dario Argento sera un héros. Le parcours de Bava illustre une autre époque de l’industrie du cinéma, lorsque Hollywood allait à Rome tourner à moindre coût des séries B, voire Z. En Italie, le même Bava, as de la débrouille, savait inventer du cinéma à partir de budgets ridicules. Raoul Walsh, avec qui il travailla sur un tournage à Cinecittà, dit un jour à son propos : « Tant qu’il y aura des hommes comme lui, on n’aura jamais à craindre un déclin de la production cinématographique. »

Cette créativité, cet humour aussi, tout cela se ressent dans La Planète des vampires. Certains des décors ont été conçus par Carlo Rambaldi, futur créateur de la marionnette E.T. En 1971, Bava racontait dans une interview comment était née cette planète peuplée d’esprits, de lumières psychés et de collines abruptes : « Il y avait le plateau de tournage, tout vide et minable, car les sous manquaient. Et je devais représenter une planète. Qu’ai-je fait alors ? Sur le plateau voisin, il y avait deux gros rochers en plastique, vestiges d’un quelconque film mythologique. »

As du cinéma à petit budget, Mario Bava a créé un univers de science-fiction avec quelques fumigènes et des rochers en plastique récupérés sur un plateau voisin. « La Planète des vampires » ont été conçus par Carlo Rambaldi, qui sera le créateur de la marionnette E.T.

Les faux blocs de pierre ont donc quitté la Rome antique pour le futur galactique. La Planète des vampires se situe donc quelque part entre le péplum, l’horreur, la science-fiction, l’érotisme… Et c’est sans doute ce qui en fait un film culte, objet de l’admiration de cinéastes aussi divers que Tim Burton, Quentin Tarantino ou Nicolas Winding Refn.

Norma Bengell, aïeule du lieutenant Ripley

On peut s’amuser au jeu des différences entre ce film et ses successeurs : voir dans ces squelettes d’humanoïdes qui jonchent la Planète des vampires les ancêtres de ceux d’Alien, constater les similitudes entre l’éveil féministe de l’actrice Norma Bengell – comédienne majeure du « cinema novo » brésilien – et celui du lieutenant Ripley-Sigourney Weaver dans le film de Ridley Scott. Et il est naturel de rire des effets spéciaux balbutiants, des maquettes de vaisseaux en carton-pâte tremblantes qui tranchent avec l’orfèvrerie numérisée des space operas actuels comme, par exemple, Jupiter : le destin de l’Univers, de Lilly et Lana Wachowski. Même si rien ne dit que ces films qui nous semblent aujourd’hui visuellement parfaits ne nous apparaîtront pas un jour grotesques.

L’actrice Norma Bengell, joue Sanya, héroïne de « La Planète des vampires ».

Si La Planète des vampires séduit aujourd’hui, c’est qu’il est en résonance avec la nostalgie sixties actuelle. Mais il plaît aussi par ce sens du style, sa façon d’habiller ses personnages de combinaisons de cuir noir gansé de jaune, au croisement entre l’uniforme SM et celui des motards. La scène dans laquelle un vampire sort du caveau où il a été enterré et que flotte dans les airs le sac plastique qui lui servait de linceul est un pur moment de cinéma.

En 1965, Bava dépoussière l’épouvante, le conte gothique, et l’envoie dans une autre galaxie. Et c’est dans ce cinéma réputé de seconde zone que sont nées les formes innovantes qui continuent de titiller les cinéastes d’aujourd’hui. Ce qui rend ce long travail d’exhumation et de restauration de films cachés d’autant plus salutaire.

« La Planète des vampires » dans sa version restaurée

La Planète des vampires, de Mario Bava, avec Barry Sullivan, Norma Bengell… 1 h 26. En salles le 6 juillet.

Par Clément Ghys

Sous ses faux airs de série B, ce film de 1965 a inspiré de nombreux cinéastes, dont Ridley Scott pour « Alien ». Une épopée à redécouvrir en version restaurée dès le 6 juillet.

Des astronautes qui débarquent sur une planète et se retrouvent confrontés à une forme de vie inconnue, c’est le scénario de « La Planète des vampires »… ou celui d’« Alien » ?

Découvrir La Planète des vampiresaujourd’hui, cinquante ans après son tournage, c’est se lancer dans une sorte d’aventure archéologique. A première vue, tout y semble daté : les décors, les costumes, le jeu des acteurs, les effets spéciaux… Pourtant, malgré cet ensemble ripoliné et exubérant d’esthétique sixties, difficile de ne pas être frappé par l’impression que ce film a façonné une partie de notre imaginaire commun, de notre envie de nous projeter dans des épopées intergalactiques.

On pouvait ignorer son existence, et ce d’autant plus facilement qu’il n’est jamais vraiment sorti en France, n’ayant fait l’objet que d’éditions vidéo ou DVD peu fameuses jusqu’à sa récente restauration. Impossible, en revanche, de ne pas connaître ceux qu’il a inspirés plus ou moins directement. Au premier chef, Ridley Scott avec sa saga Alien et sa préquelle, Prometheus. Plus généralement, des pans entiers de la science-fiction actuelle, quand un vaisseau débarque sur une planète pas toujours accueillante.

L’alliance d’Edgar Poe et de Youri Gagarine

C’est un euphémisme dans le cas de La Planète des vampires (Terrore nelle spazio, en version originale). Tourné par Mario Bava au milieu des années 1960, il est une adaptation de la nouvelle Una notte di 21 ore (« une nuit de 21 heures »), de Renato Pestriniero. Une équipe d’astronautes atterrit dans un monde désertique, envahi de fumées et de lumières rosées. A peine le vaisseau se pose-t-il que tous se mettent à se battre, mus par une force étrange. Une fois calmés, ils sortent explorer ce nouveau monde et découvrent un autre vaisseau échoué, peuplé de cadavres qui prennent vie et veulent les dévorer. Toute la réussite tient à cette capacité à mélanger des univers, à faire frissonner comme dans un film d’horreur tout en donnant à rêver de conquête spatiale. Bref, à réunir Edgar Poe et Youri Gagarine.

« La Planète des vampires » dans sa version de 1965

La Planète des vampires est le seul de la très dense filmographie de Mario Bava à s’inscrire ouvertement dans le registre de la science-fiction. Né en 1914 à San Remo, mort en 1980 à Rome, ce réalisateur aura été une sorte d’homme à tout faire du cinéma de son pays, tour à tour chef op’, décorateur, auteur, cocréateur d’un genre, le « giallo » (ou thriller à l’italienne), parrain de toute une mouvance dont Dario Argento sera un héros. Le parcours de Bava illustre une autre époque de l’industrie du cinéma, lorsque Hollywood allait à Rome tourner à moindre coût des séries B, voire Z. En Italie, le même Bava, as de la débrouille, savait inventer du cinéma à partir de budgets ridicules. Raoul Walsh, avec qui il travailla sur un tournage à Cinecittà, dit un jour à son propos : « Tant qu’il y aura des hommes comme lui, on n’aura jamais à craindre un déclin de la production cinématographique. »

Cette créativité, cet humour aussi, tout cela se ressent dans La Planète des vampires. Certains des décors ont été conçus par Carlo Rambaldi, futur créateur de la marionnette E.T. En 1971, Bava racontait dans une interview comment était née cette planète peuplée d’esprits, de lumières psychés et de collines abruptes : « Il y avait le plateau de tournage, tout vide et minable, car les sous manquaient. Et je devais représenter une planète. Qu’ai-je fait alors ? Sur le plateau voisin, il y avait deux gros rochers en plastique, vestiges d’un quelconque film mythologique. »

As du cinéma à petit budget, Mario Bava a créé un univers de science-fiction avec quelques fumigènes et des rochers en plastique récupérés sur un plateau voisin. « La Planète des vampires » ont été conçus par Carlo Rambaldi, qui sera le créateur de la marionnette E.T.

Les faux blocs de pierre ont donc quitté la Rome antique pour le futur galactique. La Planète des vampires se situe donc quelque part entre le péplum, l’horreur, la science-fiction, l’érotisme… Et c’est sans doute ce qui en fait un film culte, objet de l’admiration de cinéastes aussi divers que Tim Burton, Quentin Tarantino ou Nicolas Winding Refn.

Norma Bengell, aïeule du lieutenant Ripley

On peut s’amuser au jeu des différences entre ce film et ses successeurs : voir dans ces squelettes d’humanoïdes qui jonchent la Planète des vampires les ancêtres de ceux d’Alien, constater les similitudes entre l’éveil féministe de l’actrice Norma Bengell – comédienne majeure du « cinema novo » brésilien – et celui du lieutenant Ripley-Sigourney Weaver dans le film de Ridley Scott. Et il est naturel de rire des effets spéciaux balbutiants, des maquettes de vaisseaux en carton-pâte tremblantes qui tranchent avec l’orfèvrerie numérisée des space operas actuels comme, par exemple, Jupiter : le destin de l’Univers, de Lilly et Lana Wachowski. Même si rien ne dit que ces films qui nous semblent aujourd’hui visuellement parfaits ne nous apparaîtront pas un jour grotesques.

L’actrice Norma Bengell, joue Sanya, héroïne de « La Planète des vampires ».

Si La Planète des vampires séduit aujourd’hui, c’est qu’il est en résonance avec la nostalgie sixties actuelle. Mais il plaît aussi par ce sens du style, sa façon d’habiller ses personnages de combinaisons de cuir noir gansé de jaune, au croisement entre l’uniforme SM et celui des motards. La scène dans laquelle un vampire sort du caveau où il a été enterré et que flotte dans les airs le sac plastique qui lui servait de linceul est un pur moment de cinéma.

En 1965, Bava dépoussière l’épouvante, le conte gothique, et l’envoie dans une autre galaxie. Et c’est dans ce cinéma réputé de seconde zone que sont nées les formes innovantes qui continuent de titiller les cinéastes d’aujourd’hui. Ce qui rend ce long travail d’exhumation et de restauration de films cachés d’autant plus salutaire.

« La Planète des vampires » dans sa version restaurée

La Planète des vampires, de Mario Bava, avec Barry Sullivan, Norma Bengell… 1 h 26. En salles le 6 juillet.

Par Clément Ghys

[Chronique] A 79 ans, le Cavaliere se remet tranquillement d’une opération à cœur ouvert. Avouons-le : nous avons plus de mal à nous remettre de certains de ses looks. Ici en 1986, taille patron. On dit que le costume fait l’homme. Mais, ici, il fait surtout le patron. Fils de banquier, devenu vendeur d’aspirateurs puis chanteur de charme, Silvio Berlusconi dirige désormais la holding Fininvest, deuxième groupe d’Italie. Autant dire qu’il doit soigner sa carrure. Son costume croisé 3 x 2 (trois lignes de deux boutons) vient de la maison Caraceni, célèbre pour avoir habillé Humphrey Bogart, Yves Saint Laurent, mais surtout Gianni Agnelli, patron de Fiat, le… premier groupe d’Italie. Sous-entendu : Silvio ne se contentera pas longtemps d’une place de dauphin.

Afin de lutter contre la concurrence étrangère, un décret royal réduit la teneur en matière grasse et œuf de la mayonnaise. Sacrilège !

Le couperet est tombé : l’arrêté royal « mayonnaise » a été publié au Moniteur belge, vendredi 10 juin. Traduction ?Le Journal officiel du royaume a inscrit dans la loi un texte qui ébranle l’un des fondements de sa culture et de sa gastronomie : la « mayo », qui nappe les barquettes de frites, caractérise la célèbre recette de tomates-crevettes et lie le filet américain – le steak tartare « made in Belgium » –, vit ses derniers jours sous sa forme ancestrale.


Sous le couvert d’une « modernisation de la législation alimentaire, parfois vieille de trente ou soixante ans », le ministre flamand de l’économie et de la consommation, Kris Peeters, a posé un acte qui confine au sacrilège. La teneur minimale en matière grasse de la mayonnaise sera abaissée de 80 % à 70 % et celle en œufs, de 7,5 % à 5 %.

Un appel à consommer plus « light »

Souci sanitaire ? Industriel plutôt : les entreprises belges devraient être mieux armées face à la concurrence étrangère qui, préservée des règles en vigueur au royaume, produit déjà des sauces à moindre coût, car comportant moins de matière grasse et d’œufs. Il fallait donc aider un secteur alimentaire qui compte « parmi les meilleurs au monde » – c’est le ministre qui le dit – et, surtout, pèse 90 000 postes de travail. L’indigeste réforme, qui a déclenché un torrent de protestations, semble d’autant plus inacceptable à beaucoup de puristes qu’elle est assortie d’un appel, jugé hypocrite, à consommer plus « light ».

Il est vrai, toutefois, que 45 autres textes de la loi belge sont en cours de révision tandis que la ministre de la santé publique Maggie De Block vient de signer une convention avec l’industrie alimentaire – des chocolatiers, des chaînes de fast-food et des cuisines collectives. Le but : réduire de 5 % la consommation de graisses, de sel et de sucres. L’intention est noble

et l’engagement du secteur, prétendument sincère.

Une image d’emblème national

On relève cependant que, faute de moyens, les contrôles seront presque inexistants. En outre, des nutritionnistes redoutent l’apparition, dans les aliments, de substances peut-être plus nocives que celles dont on veut limiter la présence.

Auréolée de son image d’emblème national, au même titre que le waterzooi de Gand, le sirop de Liège ou la tarte au riz de Verviers, la sauce mayonnaise déclenche les passions. Sur les réseaux sociaux, Kris Peeters est vilipendé, accusé de favoriser des produits qui contiendront des œufs de synthèse et de l’huile de palme. « Quand notre cher Auguste Escoffier[grand cuisinier français, mort en 1935] va apprendre ça, il va se retourner dans sa tombe », écrit un lecteur sur le site du Soir de Bruxelles.

Un autre, qui dénonce cette polémique « incroyable, alors qu’il y a des événements plus graves à traiter », se fait vertement rabrouer par un contradicteur : « Ah ! Et la mayonnaise sur vos frites, c’est pas primordial, peut-être ? » Précision – non superflue : redoutant sans doute l’impopularité, Kris Peeters a, en réalité, assorti sa loi d’un discret appendice disposant qu’un label « mayonnaise traditionnelle » sera autorisé. Plus chère, celle-ci devra comporter… 80 % de matière grasse et 7,5 % d’œufs ! Magique, le compromis à la belge.

2012, COUPÉ DÉCALÉ. Kim Jong-un a 30 ans, ou 29, ou peut-être 24, on ne sait pas trop, mais il vient de ­succéder à papa Kim Jong-il à la tête de la Corée du Nord, et il se plaît visiblement sur le trône. Comment pourrait-il en être ­autrement ? Déjà, les jeunes du pays se ­précipitent dans les salons de coiffure pour se rafraîchir la raie et se dégager le tour d’oreille. Bientôt, sa coupe bénéficiera de deux appellations officielles : « Ambition » et « Jeunesse ». Car qui a envie d’une coupe « Sénilité » ?

Le Monde | 17.06.2016 à 14h42 • Mis à jour le18.06.2016 à 14h59 |Par Agnès Gautheron

La photographe allemande Lia Darjes a recueilli pendant deux ans images et témoignages de musulman homosexuel.

La série « Ame musulmane-Cœur gay » est le fruit de rencontres avec des homosexuels et transgenres de confession ou de culture musulmane. Ici, Asma et son amie à Londres.

« Homosexualité et islam sont-ils irréconciliables ? » C’est en rencontrant un imam parisien prônant l’ouverture envers les homosexuels que la photographe allemande Lia Darjes a eu envie de se pencher sur cette question. Interpellée par le sort réservé aux gays dans la plupart des Etats de culture musulmane, elle a cherché à comprendre les racines de cette homophobie. Cette même haine qui a poussé Omar Mateen à commettre un massacre dans une boîte gay d’Orlando, dans la nuit du 11 au 12 juin.

El-Farouk et son mari Troy, à Toronto. « Quand vous êtes gay et que vous grandissez dans une famille juive, chrétienne ou musulmane acquise à ce genre d’interprétation, la violence spirituelle consiste à vous bourrer le crâne de l’idée que vous avez un défaut terrible, irrémédiable. C’est pourquoi les gays finissent souvent par perdre la foi. »

« C’est l’histoire de Sodome et Gomorrhe qui sert habituellement de référence dans le Coran comme dans la Bible », note-t-elle dans le texte de présentation de son travail « Ame musulmane – Cœur gay ». S’appuyant sur les études de spécialistes des religions, elle relève que tout est affaire d’interprétation : « Selon des musulmans progressistes, le Coran ne dit pas clairement que l’homosexualité est un péché », écrit-elle. De 2013 à 2015, elle est allée à la rencontre de musulmans gay pour comprendre comment ils vivent cette double identité.

« Pourquoi les gens ne peuvent-ils pas comprendre qu’il y a différentes façons d’être musulman ? Pourquoi sont-ils capables de l’accepter pour le christianisme et le judaïsme et pas pour l’islam ? » Samira, Toronto

El-Farouk et Troy à Toronto, Daayie à Washington, Ludovic à Paris… Tous affirment avoir dû faire face doublement aux préjugés. « Je viens d’un pays où être lesbienne peut vousvaloir la peine de mort », lui a confié à Toronto Samira, d’origine iranienne, qui, bien qu’athée, se considère de culture musulmane. « J’ai grandi dans une famille non pratiquante mais après

le 11-Septembre, je suis soudainement devenue musulmane dans le regard des autres. Pourquoi les gens ne peuvent-ils pas comprendre qu’il y a différentes façons d’être musulman ? Pourquoi sont-ils capables de l’accepter pour le christianisme et le judaïsme et pas pour l’islam ? 
» Au lendemain de l’attaque d’Orlando, le travail de Lia Darjes prend une nouvelle résonance.

Daayie, imam, à Washington. « Je me suis converti à l’islam il y a 34 ans. En tant qu’imam ouvert et homosexuel, je comprends les souffrances des gays musulmans. L’islam  n’est pas uniquement une religion ou une croyance, c’est aussi un projet de vie qui dépend de la culture environnante. À partir du moment où Allah démontre que la création est un lieu d’une grande diversité, la question devient : la respectons-nous ? »

Lire aussi : Orlando : le tireur était un client régulier du Pulse

  • Agnès Gautheron

    Journaliste au Monde

Le Monde | 16.06.2016 à 17h08 |Par Pierre Jaxel-Truer

A Kusadasi, en Turquie, un vieil Airbus vient d’être coulé pour attirer des plongeurs. Objectif : relancer la fréquentation touristique. Original ? Pas vraiment.

Juin 2016 : un avion plongé en mer Egée

A Kusadasi, en Turquie.

Aux grandes crises, les gros moyens. Dans la station balnéaire de Kusadasi, en Turquie, les réservations se font rares, sur fond de crise au Moyen-Orient. Afin de relancer le tourisme, les autorités ont donc décidé de couler un vieil Airbus A 300 en mer Egée, en espérant attirer les fans de plongée dans la région, avec cet appât aéronautique.

Février 2016 : des sculptures sous-marines aux Canaries

L’artiste britannique Jason deCaires Taylor au milieu de ses statues à Lanzarote aux Canaries.

Au large de Lanzarote, dans les îles Canaries, en Espagne, les touristes palmés peuvent d’ores et déjà nager au milieu des sculptures rassemblées dans le troisième musée sous-marin imaginé par l’artiste britannique Jason deCaires Taylor, qui sera inauguré cet été. Un geste artistique et politique : ces 250 statues représentent des migrants.

Novembre 2015 : un navire immergé dans le Pacifique

Rosarito Beach au Mexique, le 21 novembre 2015.

Plus imposant encore qu’un avion de ligne, mais moins incongru en mer, un ancien patrouilleur de l’armée mexicaine a été immergé fin 2015 au large de Rosarito Beach, en Basse-Californie, au Mexique. C’est le point de départ d’un plus vaste projet, censé devenir une sorte de parc d’attractions sous-marin.

Mai 2011 : un Tupolev coulé en mer Noire

Baie de Varna, Bulgarie.

Pour attirer le chaland à palmes et bonbonne d’oxygène, la Bulgarie n’a pas hésité à couler le Tupolev de Todor Jivkov, l’ancien dirigeant communiste du pays. Une sorte de plongée dans l’histoire… L’avion repose dans la baie de Varna, en mer Noire, à une vingtaine de mètres de profondeur.

Début 2008 : de l’art subaquatique à Cancun

A Cancun, au Mexique.

Le plus grand musée sous-marin du monde est né de l’imagination de Jason deCaires Taylor. Au large de Cancun, au Mexique, on peut circuler dans trois galeries sous-marines, entre trois et six mètres de fond. Environ 500 sculptures de cinq artistes ont été créées pour ce projet.

  •  Pierre Jaxel-Truer

    Journaliste au Monde
    SuivreAller sur la page de ce journaliste