La branche américaine des Petites sœurs des pauvres a fait tonner sa voix jusqu’à la Cour Suprême pour ne plus avoir affaire, en tant qu’employeur, à la question de la prise en charge des moyens de contraception de leurs employés.

Le seul fait d’évoquer une méthode contraceptive constitue-t-il une entorse insupportable à la doctrine chrétienne ? Les religieuses des Petites Sœurs des pauvres, soutenues par diverses associations et universités chrétiennes américaines, en sont convaincues. Et ce qu’elles tiennent pour une offense à leur foi s’est frayé un chemin jusqu’à la Cour suprême des Etats-Unis.

Concrètement, avec la réforme de l’Obamacare, le système de santé américain prévoit que les employeurs garantissent à leurs salariées une couverture santé incluant le remboursement des produits contraceptifs et abortifs. Les autorités, prudentes, ont permis aux employeurs qui le souhaitent de refuser cette clause. L’Etat s’engage, dans ce cas, à prendre en charge les moyens contraceptifs utilisés par des salariés. Mais ce geste est insuffisant aux yeux des religieuses.

Le 23 mars devant la Cour suprême à Washington. La branche américaine des Petites Sœurs des pauvres refuse d’être confrontée à la question de la contraception de ses salariées.

Les nonnes estiment en effet que le simple fait de devoirrayer dans les documents administratifs la ligne consacrée aux pilules, stérilets et produits abortifs suffit à leur fairetoucher du doigt des pratiques contraires à leur foi. Il s’agit, selon elles, d’une atteinte à leur liberté religieuse. En septembre, lors de son voyage aux Etats-Unis, le pape François avait pris le temps d’une courte visite chez les Petites Sœurs des pauvres pour leur exprimer tout le bien qu’il pensait d’une telle démarche.

Quelle qu’en soit l’issue, cette offensive ne devrait pas avoir de répercussions sur les droits des femmes américaines. Mais elle illustre la crispation grandissante de groupes religieux sur les questions de l’avortement, de la contraception ou du mariage gay, de même que le fossé béant entre ­conservateurs et libéraux. Un clivage que symbolise ­parfaitement la Cour suprême : délibérant fin mars à ce sujet, les huit juges de la plus haute instance judiciaire sont apparus divisés en deux camps. Ils ont fini par demander aux deux parties de parvenir à un compromis pour sortir de l’impasse d’ici au 20 avril.

Des lobbys religieux offensifs

La polémique déclenchée par les nonnes survient alors que des groupes religieux enregistrent alternativement victoires et défaites à travers les Etats-Unis. Mettant en avant la défense de leur liberté, ils ­promeuvent des textes ayant pour effet de discriminer toute personne dont le mode de vie heurte leurs croyances, en premier lieu les personnes homosexuelles et transsexuelles (LGBT). Ainsi, la Caroline du Nord vient d’adopter une loi interdisant aux personnes transgenres d’utiliser les toilettes publiques correspondant à leur identité sexuelle.

Lors de la manifestation des religieuses, le 23 mars, devant la Cour suprême des Etats-Unis, à Washington.

A l’inverse, le gouverneur démocrate de ­Virginie vient de mettre son veto à une loi du même style, estimant que « ce texte diabolise certaines personnes et qu’il nourrit les peurs et les persécutions ». En Géorgie, un décret qui permettait notamment aux organisations confes­sionnelles et aux particuliers de refuser ­d’embaucher, de louer un logement ou encore d’admettre dans les écoles des personnes menant une vie contraire à leurs valeurs religieuses vient d’être retoqué par le gouverneur républicain. De nombreuses entreprises avaient menacé de boycotter l’Etat, si une telle loi était adoptée.

L’association de défense des LGBT Human Rights Campaign estime que 200 textes discriminatoires envers les homosexuels et les transsexuel­(le)s sont en vigueur dans une trentaine d’Etats américains.

Lire aussi : Etats-Unis : confusions au Parti républicain sur les droits des homosexuels et des transgenres

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